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    Clarifier les exigences en rédaction, sans tomber dans le technicisme

    Élèves très actifs pendant une leçon de rédaction très active 

     

     

    Depuis quelques années, la didactique de l'histoire s'est détournée du ''tout-document'' qui avait régné en maître depuis les années 70, au profit des activités d'écriture, notamment à celle qui consiste à raconter les événements historiques.

    Didier Cariou1, à l'origine de ce ''tournant scriptural'', a montré l'intérêt heuristique de la pratique de l'écriture historique, qui engage les élèves dans une véritable recherche de compréhension. Une des conséquences en fut l'introduction dans les programmes d'objectifs de techniques rédactionnelles, résumés par des ''verbes de consignes'' au contenu le plus précis possible : expliquer, raconter, situer, etc2. Il s'agit d'habituer les élèves à des exercices codifiés, soumis à des exigences immuables au fil des ans, et donc susceptibles d'être enseignés selon une progression rigoureuse.

    En français, les programmes sont loin de témoigner d'une réflexion aussi pertinente au sujet de l'enseignement de l'écriture. Les programmes de collège d'avant 2008 avaient pourtant adopté comme principe de structuration les distinctions entre différents ''types de texte''. Mais le cadre de la programmation en ''séquences'' décloisonnées, mêlant étude de la langue, étude des textes, littéraires ou non, et écriture, empêchait que l'accent fût mis sur les différentes modalités d'écriture.

    De fait, la distinction entre textes ''narratifs'', ''descriptifs'', ''explicatifs'' et ''argumentatifs'' a fait l'objet d'un enseignement techniciste, partant le plus souvent d'un cours théorique sur leurs différentes composantes et les principales différences permettant de les distinguer. Le choix des textes à étudier était déterminé par ces considérations taxinomiques, et non plus par des critères thématiques ou bien d'histoire littéraire.

    En outre, cette conception atomiste de l'écriture littéraire a conduit à adopter des programmes cumulatifs, allant du simple au composé, très contestables autant au niveau de la pratique d'écriture que des centres d'intérêt des élèves. Pourquoi un élève de 6e serait-il plus friand de récit ''simples'', et ne serait-il pas capable de jouer, même sommairement, avec les points de vue ou bien avec l'enchâssement narratif ? Il est par ailleurs très contestable de penser qu'il faille d'abord travailler le récit, puis la description, avant de s'essayer à des récits mélangeant narration et description. Il faudrait supposer pour cela l'existence d'une pratique courante du récit sans description, ce qui n'est pas possible : la plupart des récits décrivent peu ou prou les acteurs et les décors qui les composent.

    Bref, la didactique du français, dans sa tentative de rendre plus rationnel l'enseignement de la lecture et de l'écriture, s'est engagé sur un chemin intéressant, mais a très vite fait fausse route.

     

    Quelle seraient les conditions pour introduire dans les programmes de collège ces ''verbes de consignes'' apparemment si précis et si pratiques en histoire ?

    Il faudrait d'abord définir ce qu'on veut faire faire aux élèves. Pour ma part, il me semble qu'on peut leur demander, à l'issue de la classe de troisième, de savoir raconter une histoire et de savoir formuler un raisonnement.

    Raconter et raisonner sont des activités suffisamment vastes pour contenir un ensemble d'autres pratiques d'écritures. Quand on raconte, on décrit (les personnages, les décors, les accessoires) et on explique (les motifs et les raisons de l'action, ainsi que ses implications émotionnelles chez les personnages). Quand on raisonne, on décrit (l'objet de la réflexion), on explique et on justifie (le propos tenu sur cet objet).

    Se cantonner à ces deux grands types d'écriture peut paraître étrange. Mais ce minimalisme permet de prendre préserver le caractère global et intuitif de l'activité d'écriture. Tout le monde est amené à raconter une histoire ou une anecdote, ou bien à soutenir un propos par des arguments. Les autres activités sont plus ponctuelles, et plus rares. Décrire longuement quelque chose est assez peu fréquent. De même, on explique rarement quelque chose en dehors d'une situation de dialogue. La tradition scolaire de la description, issue de la tradition rhétorique, atteint très vite des limites dans le cours de français : ennui des élèves et artificialité des sujets.3

    En revanche, l'élève de sixième a très souvent le désir de raconter. Cette activité le réjouit, beaucoup plus que de longues descriptions et de laborieuses explications. Ces dernières excèdent d'ailleurs souvent leurs capacités d'expression. C'est pourquoi il est hors de question de mettre sur un pied d'égalité ces deux piliers de la pratique d'écriture. Au début du collège, il faut principalement raconter.

    Idéalement, l'élève de troisième doit avoir gardé ce plaisir de raconter, tout en développant une capacité à formuler un raisonnement. C'est pourquoi il n'est pas possible de ne faire écrire que des récits au début du collège : il n'y aura pas trop de quatre ans pour apprendre à raisonner par écrit.

    Ces deux grandes activités d'écriture doivent naturellement se succéder dans le temps. Le récit doit occuper la plus grande part du travail des élèves de sixième, et laisser de plus en plus de place au raisonnement.

     

    Raconter

     

    Les jeunes élèves aiment raconter sans décrire, ou presque, multipliant les péripéties et les passages dialoguées. Ils ont encore une vision du récit comme drama aristotélicien, terme qu'on peut traduire par l'action humaine. L'important, dans une histoire, c'est qu'il y ait de l'action, qu'il se passe des choses. Et comme ces actions concernent des humains, qui ont la spécificité, parmi tous les autres acteurs possibles, d'être doués de paroles, elles font parler, quand elles ne consistent pas purement et simplement en une suite de paroles.

    En outre, les élèves ont une intuition très confuse de la fonction communicative du récit, et donc de leur position d'auteur vis-à-vis d'un lecteur, à qui il faut faire imaginer les scènes racontées, puisqu'il n'est pas dans la tête de l'auteur, et à qui il faut expliquer les tenants et les aboutissants des actions racontées. C'est d'ailleurs sans doute pour cela que le dialogue a une place si importante dans leurs écrits : l'élève joue le rôle des personnages, beaucoup plus qu'il ne raconte ce qu'ils font.

    Ce qui manque, dans les rédactions d'élèves, c'est le monde, le monde extérieur, ses apparences et son fonctionnement, le monde intérieur, ses ressorts et ses mouvements. Le moi y est omniprésent, projeté sur tout les éléments du récit. Mais, paradoxalement, ce moi trop présent est stéréotypé, sans originalité. Sans contexte matériel et sensoriel, sans profondeur psychologique, ce moi n'est qu'une surface de réflexion de l'opinion, des clichés et des ''scripts'' narratifs les plus éculés.

    Ainsi, description et explication sont des composantes peu naturelles chez les élèves, surtout chez les petits lecteurs, au contraire du dialogue et de la narration pure. C'est de ce point qu'il faut partir, en faisant progressivement acquérir des capacités de description et d'explication, à l'intérieur même de l'acte de raconter. S'il est tout à fait légitime de consacrer quelques leçons d'écriture à la description, et de faire lire des textes descriptifs (notamment des textes de poésie), il n'y a pas lieu de séparer les deux ni de faire de la maîtrise de la description un préalable à la pratique de la narration descriptive. Cette simultanéité permettrait en outre d'éviter une conception trop monolithique de la description et de faire préférer aux longs ''tunnels'' descriptifs (portraits complets des personnages, description initiale des décors) une multitude de ''détails descriptifs'', plus rapides et plus expressifs.

     

    Rédiger et s'entraîner à rédiger

     

    Cependant, le rejet d'une progression cumulative des exigences dans le cadre de l'exercice canonique de la rédaction n'empêche pas d'élaborer une progression dans l'apprentissage des techniques d'écriture. En somme, il faudrait demander aux jeunes élèves de collège des compositions toujours soumises à des exigences semblables, mais de difficulté graduées (on ne décrit pas de la même façon à 11 ans et à 14 ans, un objet qu'on connaît bien ou un objet qu'on connaît encore mal, etc.) Mais cette persistance des exigences doit s'accompagner d'un véritable cours d'écriture, dans lequel on donne des outils pour raconter, décrire et expliquer : des patrons syntaxiques, des mots récurrents, des techniques d'enchaînement des phrases, etc.

    Il faut donc se garder de proposer des rédactions aux exigences cumulatives : on ne peut faire autrement que de demander, et cela dès la sixième, de raconter à la fois en décrivant et en expliquant. Pour cela, il convient de distinguer les compositions, exercices de rédaction traditionnels, répondant à un ''sujet'' précis, et développé un peu longuement, et les exercices de rédaction, plus courts, ciblés sur une difficulté technique à travailler.

    Dans les compositions, il s'agit de s'engager dans un projet global d'écriture, à destination d'un lecteur, et mettant en œuvre une somme importantes de composantes et de critères de réussite variés. Si l'on insiste trop sur ces points précis, on risque de faire perdre le caractère spontané de l'écriture narrative, son intention spécifique, communs à la littérature et aux récits de la vie quotidienne. Au lieu d'un geste vivant, irrigué par la volonté de l'élève, on ne peut obtenir qu'une construction de bric et de broc, maladroite car excédant ses capacités de mémoire immédiate.

    On évitera donc des sujets trop fermés, des pastiches ou des suites de textes trop liés à une lecture antérieure, mais aussi de se cantonner à des sujets appelant un récit morcelé, sans début ni fin, une scène de bataille ou de rencontre, par exemple. La propension des élèves à commencer tout récit ou extrait narratif par ''Il était une fois'' est un indice de ce besoin de récit. Pour certains d'entre eux, l'exigence consistant à démarrer in medias res et à ne pas conclure provoque une gêne presque insurmontable. Entre l'écriture libre à la Freinet et des sujets ouverts qui laissent une grande marge de manœuvre à l'imaginaire et au besoin d'expression, il y a suffisamment de possibilités pour ne pas tenter de faire de petits Proust de nos jeunes collégiens.

    Dans les exercices de rédaction, au contraire, des points techniques précis peuvent être travaillés, sans s'engager de manière globale dans un projet d'écriture. Il s'agit en quelque sorte de s'entraîner à rédiger. Des verbes de consigne plus précis peuvent être introduits, ainsi que des exigences syntaxiques, lexicales ou narratives plus contraignantes. De cette manière, on ''externalise'' en quelque sorte l'apprentissage de savoir-faire techniques, et on laisse les compositions être un espace de liberté et de jeu.

     

    Raisonner


    Le raisonnement, lui, doit faire l'objet d'une progression à part, et d'exigences particulières. On n'écrit pas de la même manière quand on raconte et quand on raisonne. Ce ne sont pas les mêmes mots, les mêmes plans, les mêmes enchaînements de phrase. En outre, on l'a vu, les élèves n'ont pas pour cette pratique le même appétit que pour l'activité du récit, plus naturelle pour eux.

    Les composantes d'un tel exercice sont d'ailleurs assez différentes. Décrire un personnage met en jeu les mêmes phrases et les mêmes mots que décrire une ''figure'' de style ou un texte dans son ensemble. Mais l'attitude psychologique à adopter n'est pas la même. Autant il paraît assez logique de devoir décrire une chose concrète que l'on ne voit pas, autant décrire un fait de langue, c'est-à-dire le même matériau qui servira justement à formuler la description, semble redondant et tautologique à la majorité des élèves de collège.

    C'est d'ailleurs pour cela que l'apprentissage du raisonnement écrit ne peut être le seul fait du cours de français, et peut se faire de manière beaucoup plus naturelle dans d'autres matières, qui se confrontent à des choses : histoire, géographie, sciences naturelle, etc. C'est aussi pour cela que cet apprentissage de la description doit commencer, même modestement, dès l'école primaire, où le décloisonnement entre disciplines est beaucoup plus aisé à pratiquer au quotidien que dans le secondaire. De même, cette plus grande évidence de la description des choses amène à intégrer au collège des exercices de raisonnement écrit sur des sujets non littéraires.

    En outre, dans le cadre du raisonnement sur un texte ou sur la langue, la description recoupe d'autres pratiques : celle de la paraphrase, du résumé et du développement, ainsi que de la citation. Un texte ou un énoncé peuvent certes être décrits, mais aussi paraphrasés, c'est-à-dire reformulés avec d'autres mots. Cet exercice est d'un grand intérêt pédagogique, puisqu'il permet d'engager véritablement les élèves dans leur compréhension active4. Autrefois très pratiqué, notamment dans l'exercice de ''l'analyse littéraire''5, il est tombé en désuétude avec l'arrivé des nouveaux outils d'analyse tels que le structuralisme, la linguistique énonciative, etc. La paraphrase est honnie, au lieu de faire l'objet d'un apprentissage, seul à même de la canaliser et de l'empêcher d'être un obstacle à l'explication véritable des textes.

    Le résumé est une paraphrase plus courte que le texte d'origine. Le développement est une paraphrase plus longue. Ces deux exercices peuvent être introduits avec fruit, de manière parallèle et complémentaire.

    Enfin, le citation est une manière directe de rappeler le texte, non plus à travers son contenu, mais en en prélevant les termes mêmes. Elle s'oppose à la paraphrase, non pas comme le bien au mal, mais comme un moyen différent d'atteindre le même but, celui de faire rentrer le discours du texte dans le discours qui est chargé d'en parler.

    Ainsi, décrire et paraphraser-citer sont des activités jumelles qu'il convient d'enseigner au collège.

    Cependant, la description et la paraphrase-citation ne forment pas un raisonnement sans explication et sans justification. Là encore, la difficulté est celle de la prise en compte du lecteur. Les élèves n'ont pas conscience de la nécessité, ni souvent de l'intérêt, de décrire et de citer ce sur quoi ils raisonnent, ni d'expliquer et de justifier leur propos.

    Expliquer consiste à préciser ce que l'on veut dire. Comme le veut l'étymologie, on ex-plique, on ''déplie'' l'objet du discours en explicitant toutes les implications et les présupposés d'une proposition.

    Justifier consiste à donner des gages de la valeur de vérité de cette proposition. Cette activité peut aller jusqu'à démontrer une affirmation, mais cela n'est pas le cas en français. Le verbe ''justifier'' laisse davantage de place à l'erreur, à la contestation possible du lecteur, et donc à la prudence.

     

    Enseigner le raisonnement écrit

      

    Il est tout à fait possible d'imaginer un cours progressif qui enseigne le raisonnement écrit, non pas en exposant cette nomenclature de manière théorique, mais en donnant des ''trucs'' d'écriture, en proposant des exercices courts et ciblés qui permettent d'acquérir concrètement et pratiquement de l'aisance dans la formulation des thèses défendues, de leur explication et de leur justification.

    Il ne s'agit pas cependant de faire de telle ou telle composante du raisonnement un préalable au raisonnement, ni d'imposer un ordre contraignant dans l'apprentissage de ces exercices. Comme pour le récit, tout doit être demandé simultanément (même si l'on peut évidemment insister sur tel ou tel point lors des corrections et dans la confection des consignes de rédaction ou dans celle des barèmes d'évaluation). C'est le rôle du cours et des exercices de rédaction de faire acquérir ces composantes, et non des compositions, qui doivent toujours être envisagées par l'élève dans leur globalité.

    Cet apprentissage du raisonnement écrit est long et difficile. Il doit donc commencer très tôt, même modestement, et finir très tard : un élève de troisième a encore du chemin à parcourir pour formuler correctement un véritable raisonnement à l'écrit. Une stricte succession du récit et du raisonnement n'est pas souhaitable, parce qu'elle laisserait trop longtemps en friche les capacités de raisonnement des plus jeunes élèves, et laisserait les savoir-faire narratifs acquis de haute lutte se déliter et tomber doucement dans l'oubli, faute d'exercice.

    Il reste à trouver quelles consignes proposer aux élèves, puisque on ne peut pas leur demander de ''raisonner'' ni de ''réfléchir''. Le raisonnement écrit peut être enseigné en sixième, sous la forme très simple de la réponse à une question. La consigne répondre à une question est le plus sûr moyen de faire apprendre à raisonner à l'écrit. Des consignes plus vastes et moins directives, comme analyser ou bien interpréter, ne sont pas accessibles à un jeune élève. Il faut donc les inciter à réfléchir par le point d'entrée le plus naturel, le plus quotidien, à savoir la question. Naturellement, les questions trop techniques, trop précises, sont moins utiles que des questions plus ouvertes, dont la réponse doit être développée en plusieurs phrases liées entre elles. Les questions plus courtes sont très utiles, mais dans une phase de préparation à la réponse à une question plus vaste, ou bien à l'élaboration d'un paragraphe de leçon.

    Cependant, il y a aussi lieu de mettre en place les prémices d'une réflexion autonome, non suscitée par le questionnement professoral. L'exercice de paraphrase, ou de résumé, peut ainsi donner lieu à des réécritures commentées : il s'agit de redire le contenu du texte, en suivant son plan, qu'on a auparavant déterminé, en faisant toutes remarques utiles : stylistiques, esthétiques, interprétatives. Il s'agit de ce qu'on appelait autrefois l'analyse littéraire complexe, par opposition à l'analyse littéraire simple, qui n'était qu'une paraphrase6. Il s'agit d'un bon exercice de fin de collège, qui permet de sortir du carcan de la question imposée et de laisser l'élève libre de ce qu'il a à dire, sans exiger de lui de cohésion excessive de son propos. Ce faisant, il apprend bon nombre de formulations nécessaires aux exercices de commentaire textuels du lycée. La consigne faire toute remarques utiles, ou un équivalent, est donc possible.

     

    ***

    Ainsi, on opérera un glissement entre le récit et le texte de réflexion.

    En sixième et en cinquième, les compositions seront consacrées à raconter, encore et toujours. Raconter en décrivant, raconter en expliquant. Le cours de rédaction demandera plus spécifiquement de décrire, d'expliquer, et de répondre à une question, en plus d'exercices consacrés à des acquisitions plus spécifiquement syntaxiques et textuelles. En cours de littérature, on commencera l'apprentissage du raisonnement écrit par la pratique de la réponse à une question et la rédaction d'un ou plusieurs paragraphes de leçon.

    En quatrième et troisième, on continuera l'apprentissage narratif, tout en introduisant des compositions sous forme de questions, sortes de préambule à la dissertation. En cours de rédaction et en cours de littérature, on demandera de décrire des phénomènes textuels et stylistiques, d'expliquer une affirmation en la développant, et de la justifier. Plus important, on fera paraphraser, résumer ou développer, et citer, en laissant de plus en plus de liberté de faire toutes remarques utiles.

    Le cours de rédaction est utile pour faire des apprentissages techniques, les compositions pour réinvestir ces apprentissages dans des textes plus longs et engageant davantage la personne de l'élève dans un acte de communication avec le lecteur, et le cours de littérature pour pratiquer au quotidien l'écriture de réflexion. Mettre en place ces trois domaines parallèles multiplie les occasions de transférer des savoir-faire techniques et des attitudes globales d'écriture. Il s'agit en outre de tenter de préserver autant que faire se peut le caractère plaisant, intuitif et spontané de l'acte d'écriture dans les compositions, sans les polluer par un excès d'exigences techniques, notifiés dans de longues consignes et de longs barèmes décourageants.

    La clarification des verbes de consignes permet en outre de faciliter les corrections de rédaction. Il suffit, dans bien des cas, de demander de décrire ou d'expliquer davantage, de développer ou de résumer. À force de croiser et d'appliquer ces consignes récurrentes, elles deviendront familières aux élèves et clarifieront les attendus des exercices, en donnant des pistes concrètes et positives d'amélioration.

    Ce travail de clarification et de rationalisation peut se faire en faisant attention à ne pas tomber dans un technicisme mortifère et sclérosant, grâce au choix des sujets de composition, conçus pour laisser des marges d'interprétations importantes aux élèves. Il ne peut se passer d'un travail parallèle d'acquisition d'un programme de connaissances riche, dense et progressif, rendu notamment possible par un ensemble de lectures variées et nombreuses.

    La difficulté reste de concevoir un véritable cours de rédaction. L'école d'autrefois y avait pourvu, notamment dans les superbes manuels de rédaction des années 40 à 60. Le manuel Apprendre à rédiger pas à pas, pour l'instant de niveau 6e, élaboré par C. Hars, V. Marchais, C.-H. Pinon, est pour l'instant le seul héritier digne de cette lignée. Il y a donc encore du travail !

     

    1Didier Cariou, Écrire l'histoire scolaire. Quand les élèves écrivent en classe pour apprendre l'histoire, PU Rennes, « Paideia », Rennes, 2012, 250 p.

    2Voir le « « Vademecum des capacités en histoire-géographie-éducation civique » ; URL : http://eduscol.education.fr/cid58268/vade-mecum-des-capacites-histoire-geographie-education-civique.html

    3Ce n'est pas le cas dans d'autres matières, notamment les sciences naturelles et physiques.

    4Bertrand Daunay, Éloge de la paraphrase, Presses Universitaires de Vincennes, " Essais et savoirs ", Saint-Denis, 2002.

    CR : http://www.fabula.org/cr/389.php

    5André Chervel, ''L’invention de la dissertation littéraire dans l’enseignement secondaire français'', Paedagogica Historica, Volume 40, No. 3, Juin 2004, p. 265-266.

    6André Chervel, op. cit. , p. 272.


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