• 3 raisons de réintroduire la géo physique

     

    3 raisons de réintroduire la géographie physique dès l'école primaire

     

    Géographie physique (et humaine) en CE1, 1955.

     

    Le projet de nouveaux programmes de géographie pour le cycle 3 (CM1-6e) prend le parti de commencer directement cette matière par de la géographie humaine. Pas de plaines, de côtes, ni de montagnes, mais des actions comme « se loger », « transporter », consommer » ou « habiter ».

    En cycle 2 (CP-CE1), pas plus de références à la géographie physique.

    On voudrait faire en primaire comme on fait à l'université, qu'on ne s'y prendrait pas autrement.

    Pourquoi est-il nécessaire de proposer très tôt, avant des problématiques de géographie humaine, des éléments variés et structurés de géographie physique ?

     

    1 – La géographie physique développe l'imaginaire géographique des élèves.

     

     Si l'on commence par la géographie humaine, on court deux lièvres à la fois :

    - l'aspect physique (géologie, géomorphologie, botanique, etc.),

    - et les aménagements humains.

    Tout occupés à réfléchir à des concepts abstraits comme le déplacement, la consommation, la communication ou l'habitat, les élèves devront assimiler en même temps des éléments de géographie physique.

    Pas d'enseignement systématique des différentes formes du relief, donc, mais quelques remarques faites au coup par coup.

    Il est à parier que la mémoire à court-terme des élèves ne leur permettra pas de mémoriser tout cela. Et si les évaluations portent sur les points au programmes, ce sont la plaine et la végétation méditerranéenne qui passeront à la trappe.

    Commencer le plus tôt possible à apprendre les formes globales du paysage et du relief est nécessaire pour planter le décor nécessaire à des réflexions ultérieures. Les abstractions parfois difficiles auront bien plus de chance d'être comprises et retenues. La géographie fonctionne en cela comme l'histoire.

    Ce n'est pas parce que les éléments physiques sont intimement mêlés à l'action et à la perception humaine qu'il n'est pas pédagogiquement utile de les distinguer dans un premier temps.

     

    2 – La géographie physique donne l'occasion de faire de la géographie humaine.

     

    On peut faire très tôt de la géographie, qu'elle soit physique ou humaine. S'il faut commencer par une bonne dose de géographie physique, cela ne veut pas dire qu'il faille tenir un discours déterministe.

    Au contraire, les cours de géographie physique sont l'occasion d'introduire des éléments de géographie humaine.

    Commenter un paysage de montagne permet de parler de déplacement, d'industrie des loisirs, de ressources, de production, etc. L'élément physique devient le support matériel d'une constellation de faits géographiques et permet leur ancrage dans la mémoire et dans l'imagination.

    La photographie bien choisie d'une montagne, ou une belle illustration synthétique pleine de détails, peuvent amener à des analyses géographiques qui excèdent leur contenu a priori purement géo-morphologique.

    Plus tard, ces éléments de géographie humaine pourront être à loisir détaillés, discutés, comparés et conceptualisés.

     

    3 – La géographie physique est plus interdisciplinaire au niveau primaire.

     

    La géographie telle qu'elle sera introduite dans le cursus primaire recoupe des considérations économiques, politiques et sociologiques. Toutes ces matières sont belles et bonnes, et il n'est pas du tout illogique de préparer leur enseignement ultérieur par la géographie, dès le Cours moyen.

    Mais, ce faisant, on oublie des liens interdisciplinaires qui auraient pu être introduits plus tôt.

    Quid du lien avec les sciences naturelles ? Une géographie plus physique, commencée dès le CE au plus tard, permettrait de multiples liens avec la chimie, la physique, l'astronomie, la géologie.

    C'était le cas autrefois quand les manuels de leçons de choses commençaient avec l'étude du morceau de craie utilisé en classe pour écrire sur les ardoises. On en détaillait les propriétés, on faisait quelques expériences simples, et on pouvait aisément parler des belles falaises de Normandie.

    Quid du lien avec l'histoire ? Autrefois, la domination humaine sur la nature était moindre. Il est donc facile de lier l'étude du relief, de la végétation et de la faune à des faits historiques anciens.

    Pensons à l'étude de la Loire, qui peut donner lieu à de belles leçons sur la navigation en « gabarres ».

     

    ***

     

    Il est donc urgent de préciser la dimension physique de l'enseignement de la géographie et de l'avancer du cycle 3 au cycle 2.

    Je vous encourage à feuilleter le manuel du GRIP Ma première géographie documentaire, de Didier Glad : 

    http://www.instruire.fr/GRIP_1_WEB/FR/Ouvrage.awp?Ouvrage=GEO-1,

    et à lire les prolongements proposés dans une inspiration "active" :

    http://doublecasquette3.eklablog.com/geographie-au-cp-a114858600 

     

     

     

     


  • Commentaires

    1
    Vendredi 1er Mai 2015 à 19:31
    Pour votre second point, je pense qu'il faut voir au-delà de la géographie humaine : apprendre relativement tôt les bases de la géographie physique profitera à plein d'autres disciplines. Difficile de parler de la différence entre roches magmatiques/sédimentaires/métamorphique à un élève qui n'a pas vu en cours de géographie ce qu'est un volcan ou une plaine.

    Comme autre exemple, introduire les bases de géomorphologie (les paysages) va fortement favoriser l'acquisition de futurs cours de géologie, de même que les cours de géographie liés à l'astronomie (saisons, journées, etc) ou à la biologie (répartition des espèces vivantes sur une montagne) profiteront plus tard dans la scolarité. Et à mes yeux, cela ne peut qu'être positif.

    Sans compter que je parie que la géographie physique intéressera beaucoup plus les élèves que la géographie humaine. Au pire, voir de beaux paysages motivera plus les élèves que d'apprendre des notions vraiment trop déconnectées de ce qu'ils peuvent comprendre pour leur âge. Après, c'est peut-être le passionné de géologie qui est en moi qui se refuse à admettre le contraire, mais j'en doute.

    Après, je me doute que cela posera quand même pas mal de problèmes pour synchroniser les apprentissages en géographie avec les apprentissages en sciences naturelles, mais le jeu en vaut clairement la chandelle.

    Sincèrement, je ne comprends pas du tout pourquoi la géographie physique est le parent pauvre de la géographie à l'école primaire (et même au-delà..).
    2
    Vendredi 1er Mai 2015 à 19:48

    Et bien voilà, on est sur la même longueur d'onde ! Tout à fait d'accord. 

    Je n'oublie pas que je dois répondre à votre dernier commentaire, mais il faut que je me documente.

    À venir : défense de la pédagogie intuitive par la psychologie cognitive. 

    Avant, il faut que je lise votre cours de psy. cog., Mémoire et réussite scolaire (A. Lieury) et des trucs de psy. du développement par Michel Deleau. 

    Du boulot, quoi...

     

    3
    Vendredi 1er Mai 2015 à 20:02
    A ce propos, vous pourriez peut-être chercher des arguments dans les écrits de Bruner. Après tout, c'était un psychologue cognitif qui a joué un grand rôle dans la révolution cognitive avec ses travaux sur le transferts et la catégorisation. Et il se trouve que Bruner a écrit sur le rôle de l'intuition dans la pédagogie : cela l'a d'ailleurs mené à créer la progression spiralaire, à aborder le rôle des "structures" et savoirs transférables, etc.

    Cela pourrait vous aider à trouver des arguments en faveur de l'intuition, même si la pédagogie de Bruner demandait d'apprendre les connaissances générales et, abstraites en premier, tout comme Ausubel. Au pire, cela pourrait vous aider à formuler quelques nuances et à opérationnaliser ce que vous qualifiez d'intuition, chose qui me paraît importante dans le débat qui risque de nous opposer.
    4
    Vendredi 1er Mai 2015 à 20:10

    Bruner, j'avais déjà regardé. Je vous renvoie à 

    http://pedagoj.eklablog.com/spiralaire-vous-avez-dit-spiralaire-a108736776

    ...que vous aviez déjà commenté :-))

    Mais je suis prêt à y revenir. 

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